L’HISTOIRE DE L’AÉROSTATION – des origines à 1940
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1914. Dirigeable « Adjudant Vincenot » (France)

ENTRE 1911 et 1912, on construisit en France six dirigeables de type souple de 10 000 m3, aux seules fins militaires ; c’étaient les seuls de l’armée française au début de la Première Guerre mondiale. Celui qui, entre tous, se fit très rapidement une glorieuse renommée fut l’Adjudant Vincenot : il accomplit une cinquantaine de missions de guerre, reconnaissances et bombardements, et fut abattu après deux ans d’activité seulement sans faire de victimes. Il était long de 85 mètres et doté de deux moteurs Clément Bayard de 120 ch, capables de lui imprimer par temps calme une vitesse maximale de 50 km/h. Il avait une autonomie de 700 km. Les 28 et 29 juin 1914, il établit le record mondial de durée en volant pendant 35 h 19 mn. Son premier vol avait eu lieu en juin 1911, et bien que la puissance de ses moteurs fût assez élevée pour l’époque, on constata que l’Adjudant Vincenot ne pouvait voler avec un vent supérieur à 9 ou 10 m par seconde. Ce fut le premier aéronef français — et peut-être mondial — à avoir à son bord, en 1912, une station de télégraphie sans fil. L’année suivante, il prit part aux man’uvres du XXe corps d’armée et atteignit à cette occasion une altitude de 1 800 m. Il effectua même quelques expériences de lancement de bombes, et des actions de bombardements simulés aux places fortes de Toul et de Verdun. En août 1914, à la veille de la guerre, son équipage fut armé de mitrailleuses, et de fusils modèle 1886, le même que dans l’infanterie, tandis que sur le dirigeable on avait chargé des grenades 155 d’artillerie, c’est-à-dire sans empennage. La première action de guerre aérienne en France fut justement effectuée par l’Adjudant Vincenot avec ces obus jetés par-dessus bord par les membres de l’équipage sur les bivouacs de l’infanterie allemande, à Vitrimont, le 9 octobre 1914, ainsi que sur le fort de Camp-des-Romains que les Allemands venaient juste de prendre. Mais il n’existait pas encore d’artillerie antiaérienne et on ne parlait pas encore non plus d’avions de chasse. Le dirigeable pouvait donc encore se permettre certaines libertés.