L’HISTOIRE DE LA MARINE – des origines à 1700
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XVIIe siècle. Brûlot

 

LE brûlot ne fut pas un type de navire particulier par sa forme ou son gréement, mais bien par sa fonction qui était de communiquer aux vaisseaux ennemis le feu des matières inflammables dont ses cales étaient bourrées. Toutes sortes de petits bâtiments réformés, mais rapides et encore en état de tenir la mer, périrent glorieusement en mettant le feu à un superbe navire, plutôt que de finir dans un fond d’arsenal sous la hache des démolisseurs. Dans presque toutes les batailles navales au temps de la marine à voile, ils furent utilisés selon une tactique qui s’apparente à celle des torpilleurs modernes lancés à l’attaque des cuirassés. Des contre-brûlots, qui étaient les contre-torpilleurs de l’époque, s’interposaient pour essayer d’arrêter l’offensive de ces petits bateaux. Leur présence en grande quantité est signalée dans les récits de tous les combats navals du XVIIe siècle. Ainsi, à la bataille de Solebay, les 18 vaisseaux formant l’escadre de choc de Ruyter étaient flanqués chacun d’un brûlot. La ligne de vaisseaux qui était au vent de la ligne adverse lançait, au moment opportun, ses brûlots ; ceux-ci, le vent favorable aidant, arrivaient vite au contact de l’adversaire, à moins d’avoir été interceptés par les contre-brûlots. La maniabilité de ces bateaux, opposée à la lenteur des lourds et puissants vaisseaux, leur donnait la possibilité de choisir le point vulnérable : c’était généralement l’arrière, peu défendu et dont les sculptures constituaient un bon aliment pour le feu qui s’y propageait bientôt sous l’effet du vent portant. Au dernier moment, le brûlot sacrifié était abandonné par son équipage, qui rejoignait son escadre à bord d’une chaloupe. Les tableaux d’époque nous montrent les champs de batailles navales sillonnés de petits navires et de chaloupes accomplissant leurs missions particulières. À Cherbourg, en 1692, le « Soleil Royal » repoussa l’assaut de deux brûlots avant de succomber, car un troisième réussit à incendier le magnifique vaisseau de Tourville.