L’HISTOIRE DE LA MARINE – des origines à 1700
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XVIIe siècle. Les corsaires

 

IL est nécessaire de préciser la signification du mot corsaire, trop souvent confondu avec le mot pirate. Le corsaire se battait régulièrement contre l’ennemi auquel son pays faisait la guerre. Il y était autorisé par son roi, dont il recevait une attestation écrite appelée lettre de marque. Grâce à ce document, le corsaire capturé était considéré comme prisonnier de guerre et traité comme tel. Le pirate, par contre, était un hors-la-loi, un bandit qui — en temps de guerre comme en temps de paix — pillait n’importe quel bâtiment, y compris les navires de son propre pays. Pour lui, un seul châtiment : la pendaison. Pour faire la guerre dite « de course », le corsaire armait à ses frais, ou avec l’aide de puissants armateurs, un ou plusieurs bateaux en vue d’attaquer la flotte de commerce de l’adversaire. Le butin constitué par ses prises était partagé suivant des proportions bien définies entre le capitaine, l’équipage et le roi : ce dernier ne manquait pas d’encourager cette forme de guerre qui lui profitait sans qu’il dût la financer. La course fut une pépinière de hardis marins aux exploits fabuleux. Ils ne craignaient pas de se lancer à l’assaut de bâtiments beaucoup plus forts qu’eux, qui étaient même parfois des vaisseaux de guerre. Leurs navires étaient généralement de gracieuses frégates, rapides, légères, manœuvrant à merveille grâce à leur construction soignée et aux qualités exceptionnelles de leurs capitaines et de leurs équipages. Un Jean Bart, un Duguay-Trouin, pour ne citer que les noms les plus célèbres de cette époque, infligèrent des pertes considérables au commerce anglais et hollandais. À tel point qu’un historien britannique a pu écrire : « Au temps où notre Empire paraissait absolu sur les mers, c’est sur ces mêmes mers que nous subissions les coups les plus durs. » Parmi les prouesses les plus fameuses de Jean Bart, citons la reprise, en 1695, d’un convoi français de blé que les Hollandais avaient réussi à capturer. Cette action d’une audace inouïe sauva la France de la famine.