| L’ALTERNATIVE nouvelle qui s’offrait entre la navigation à voile et la navigation à vapeur se heurta d’abord à l’opposition systématique des marins, défenseurs acharnés de la tradition. Ils finirent par reconnaître à la marine à vapeur le titre d’auxiliaire, voire même de rivale de la marine à voile. Mais selon eux, cette dernière ne pouvait en aucun cas être détrônée. C’est dans cet état d’esprit que le Valmy, le plus grand navire en bois et à voile jamais construit, fut mis en chantier à Brest en 1838, sous le nom de Formidable. Ses plans avaient été établis par l’ingénieur Leroux et il ne fut lancé que onze ans plus tard. C’était l’un de ces vaisseaux à murailles droites dont le manque de stabilité nécessita la mise en place de soufflages en bois sous la flottaison. Le Valmy, dernier trois-ponts de la marine française, avait un déplacement de 5 570 tonnes ; il mesurait 64 m de long et 18 m de large, et était armé de 116 canons. Cette énorme coque était surmontée d’une mâture de 60 m de haut. Ainsi conçu, le vaisseau atteignait le maximum des possibilités pratiques. Au-delà, plus aucun équipage n’eût été capable de man’uvrer ces masses en disproportion avec la seule force de l’homme. C’est au cours de l’expédition de Crimée que l’on put juger de la valeur et de l’efficacité de ces gros vaisseaux à voile. or, ils s’avérèrent trop difficilement maniables, toujours à la merci des vents et des courants, et l’on fut fréquemment obligé de les faire prendre à la remorque par les navires à vapeur. Rentré en France en décembre 1855, le Valmy fut définitivement désarmé à Brest. C’est à sa nouvelle fonction de vaisseau-école qu’il devra sa célébrité. En 1863, il reprendra le nom de Borda et le conservera jusqu’à son remplacement par l’ancien Intrépide, en 1890. L’année suivante, sa coque sera condamnée et vendue. |